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Trump 2.0

Cette semaine avec Saqid

07 novembre 2024

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Trump 2.0

Les grandes agences de presse ont annoncé la victoire de l’ancien président Trump et le contrôle du Sénat par les républicains. Même si le dépouillement des votes est encore en cours, il est tout à fait possible que le président Trump remporte à la fois l’appui populaire et les sept États pivots. Le contrôle de la Chambre des représentants demeure toutefois incertain. Cela dit, si la situation actuelle se maintient (à 9 h HC le 6 novembre 2024), les républicains gagneraient la majorité de la Chambre des représentants, remportant trois sièges de plus que le minimum requis1. Le plein contrôle du Congrès est essentiel aux républicains pour l’adoption de leur programme de dépenses et de leur politique sur le plan budgétaire. Cependant, la victoire du président Trump confère un contrôle quasi unilatéral sur la politique tarifaire. Il ne faut pas oublier non plus que le Sénat prochainement contrôlé par les républicains sera responsable de la nomination des membres du cabinet et des législateurs, qui sont également des leviers et des mécanismes importants pour la mise en œuvre de politiques, notamment une réglementation assouplie sous le prochain gouvernement.

Répercussions sur la politique et le marché

Une possible victoire écrasante des républicains pourrait avoir des répercussions importantes sur la politique budgétaire, car le président Trump s’emploierait à maintenir tous les changements fiscaux prévus en vertu de la Tax Cuts and Jobs Act (TCJA) de 2017, en plus de mettre en œuvre des baisses supplémentaires, comme la réduction du taux d’imposition des sociétés à 15 % pour les fabricants américains. Il reste à savoir comment un tel programme serait déployé, mais l’objectif mis de l’avant est de rapatrier les emplois dans le secteur manufacturier aux États-Unis. Au final, les dépenses et la politique budgétaires devraient stimuler l’économie.

Ces mesures de relance supplémentaires ne sont toutefois pas seulement positives. Les baisses d’impôt et les dépenses proposées pourraient faire exploser le déficit budgétaire – déjà projeté à 6,5 % du PIB en 2025 – à 8 %, voire plus. Compte tenu de la hausse des déficits, des tarifs douaniers et des mesures de relance économique, les taux obligataires à long terme pourraient continuer de progresser, et ce, même si la Réserve fédérale américaine réduisait les taux d’intérêt à court terme. À la suite des résultats des élections, le taux des obligations du Trésor à 10 ans est passé d’environ 4,30 % à 4,46 %, ce qui a exercé des pressions sur certains segments sensibles aux taux d’intérêt du marché, comme l’habitation et l’immobilier. Si le taux des obligations du Trésor à 10 ans demeure inférieur à 5 % ou près de ce niveau, nous n’entrevoyons pas d’effet d’entraînement sur l’ensemble du marché boursier, mais une hausse marquée qui le porterait à 5,5 % ou plus se traduirait probablement par une réévaluation à la baisse des actions. Il ne s’agit pas de notre scénario de base, mais nous y voyons un risque extrême si les républicains venaient à tout rafler.

Les tarifs douaniers joueront sûrement un rôle clé dans le cadre stratégique du président Trump, en partie parce qu’ils génèrent des revenus pour le gouvernement fédéral afin de compenser une partie des réductions d’impôt et des dépenses. Pour le président Trump, les tarifs douaniers sont également l’outil par excellence pour favoriser le retour d’emplois dans le secteur manufacturier aux États-Unis. Cependant, on ne sait pas si la politique tarifaire sous une deuxième administration Trump commencerait simplement par un tarif général de 10 % ou de 20 % (si l’on met de côté la Chine, qui serait évidemment assujettie à des tarifs beaucoup plus élevés). Le 15 octobre 2024, à l’Economic Club de Chicago, l’ancien président Trump a longuement discuté des tarifs douaniers comme moyens de « ramener les entreprises au pays ». Il a dit que « la seule façon d’y parvenir est de recourir à la menace de tarifs douaniers beaucoup plus élevés que 10 % ». L’approche à l’égard des tarifs douaniers sous l’administration Trump pourrait aller d’un mode étonnamment bénin de négociation d’ententes afin de ramener les emplois aux États-Unis à l’autre extrémité du spectre, où les guerres commerciales et les tiraillements prolongés entraînent des perturbations économiques. L’approche à venir du président Trump à l’égard des tarifs douaniers demeure une source importante d’incertitude, tant au pays qu’à l’échelle mondiale, et la réaction aux résultats des élections américaines sur les marchés européens a été globalement négative.

Les secteurs des infrastructures et des services financiers réagissent favorablement aux résultats des élections. Le prochain gouvernement Trump souhaitera vivement réduire la réglementation touchant ces secteurs et promouvoir la construction de l’assise manufacturière, du réseau d’électricité et du secteur de l’énergie des États-Unis. Nous croyons que le président Trump ne fera pression que pour apporter des changements limités à l’Inflation Reduction Act (IRA) du président Biden, y compris dans des domaines comme les crédits pour l’énergie propre. Le dynamisme des infrastructures américaines découle des dépenses publiques, des projets de loi de relance budgétaire, des dépenses du secteur privé, des dépenses liées à l’IA et des entrées de fonds internationales, et devrait continuer d’être un secteur d’investissement florissant.

En résumé, dans le cadre d’un balayage républicain, les changements fiscaux et les dépenses budgétaires sont de grande envergure. La politique tarifaire s’intégrera probablement à un éventail plus large d’initiatives, mais l’approche du président Trump pourrait prendre des directions différentes. Le risque d’inflation lié aux tarifs douaniers est souvent mentionné et pourrait modérer les réductions de taux de la Fed en 2025, mais nous considérons que ce risque est relativement limité. Dans un scénario optimiste, les menaces tarifaires conduisent à la conclusion d’accords et au retour d’un certain nombre d’emplois aux États-Unis. Dans un scénario de conflits et de tiraillements prolongés, les risques liés à la chaîne d’approvisionnement et les perturbations des activités représentent un risque plus important pour l’économie mondiale. Le marché boursier américain a accueilli favorablement la victoire de Donald Trump en 2016 et manifeste le même enthousiasme précoce. Si nous continuons de penser que le contexte de marché est globalement favorable à la prise de risques, une deuxième administration Trump implique une nouvelle série de considérations, un taux d’octane plus élevé et un président prêt à se battre avec les forces économiques.


Répercussions pour le Canada : Il pourrait y avoir des sources de tension à gérer en cours de route

La plupart des observateurs s’accorderont probablement à dire que le Canada est mieux placé que d’autres grandes économies pour composer avec le deuxième mandat de quatre ans de Donald Trump. Néanmoins, nous nous attendons tout de même à ce que le Canada doive gérer diverses sources de tension pour maintenir des relations diplomatiques et de négociation mutuellement avantageuses avec les États-Unis, qui restent de loin notre principal partenaire commercial, 75 % de nos exportations y étant acheminées.

Tout d’abord, les prochaines renégociations de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique risquent d’être difficiles, dans la mesure où elles visent le surplus commercial croissant du Mexique avec les États-Unis, faisant ainsi du Canada une victime collatérale. Certes, le Canada bénéficie d’un surplus commercial de plus de 8 milliards de dollars avec les États-Unis, mais ce surplus est en grande partie constitué de marchandises (pétrole, métaux) et de véhicules à moteur, dont un grand nombre revêtent une importance stratégique pour les États-Unis ou sont produits par des sociétés appartenant à des intérêts américains. Comme nous l’avons vu lors des négociations commerciales précédentes, le Canada se verra probablement contraint de faire quelques concessions par rapport aux exigences américaines, mais nous nous attendons à ce qu’elles soient relativement mineures dans le contexte général des relations de négociation entre le Canada et les États-Unis.

Par ailleurs, le projet de Donald Trump d’assouplir la réglementation comporte des incidences plus subtiles. Même s’il est plus difficile à quantifier que les réductions d’impôts ou même les tarifs, l’excès de réglementation peut décourager les décisions de placement des entreprises et constituer un facteur clé pour une croissance économique terne. Le rendement du PIB par habitant au Canada accuse du retard par rapport à celui des États-Unis depuis près de dix ans, et nous pensons que le programme de politique de Donald Trump pourrait amplifier certains des obstacles structurels auxquels le Canada est confronté. Le Canada devra peut-être restructurer certaines de ses politiques de sorte que celles-ci correspondent davantage à celles des États-Unis s’il souhaite attirer des capitaux pour bâtir et développer son économie.

La monnaie est un paramètre clé à surveiller lorsque l’on cherche à comparer le rendement économique relatif de deux pays. Nous pensons que le huard connaîtra des difficultés en 2025 au cours de la première année du mandat du président Trump.

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Sources

1New York Times

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