Commentaire

Les guerres commerciales commencent : de nouvelles turbulences, mais des occasions prudentes se profilent à l’horizon

Ce que beaucoup considéraient comme une stratégie de bluff et de négociation dure, pour laquelle le président Trump est bien connu, est maintenant réalité : des tarifs douaniers élevés ont été imposés à de grands partenaires commerciaux des États-Unis.

05 février 2025

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La guerre commerciale internationale pourrait-elle faire dérailler le marché boursier haussier?

Ce que beaucoup considéraient comme une stratégie de bluff et de négociation dure, pour laquelle le président Trump est bien connu, est maintenant réalité : des tarifs douaniers élevés ont été imposés à de grands partenaires commerciaux des États-Unis (Lire : Trade War Impacts:First Pass [en anglais seulement]). Les marchés ont réagi négativement à la confirmation de la rumeur, mais on ignore toujours quelles seront les perspectives en matière de politique commerciale la semaine prochaine, le mois prochain ou l’an prochain. Mais quelques heures après la mise en œuvre des tarifs douaniers, après quelques appels téléphoniques et des changements apportés aux politiques frontalières (plus de troupes à la frontière), le Canada et le Mexique ont réussi à retarder d’un mois la mise en place des tarifs douaniers. Cette tournure favorable des événements a aidé les marchés à se redresser partiellement et a alimenté les rumeurs selon lesquelles les tarifs pourraient être abaissés dans un avenir pas trop lointain. Même si nous nous attendions à ce que les 100 premiers jours au pouvoir du président Trump soient cahoteux, l’imposition de tarifs douaniers punitifs de 25 % a surpris les investisseurs.

Les mécanismes économiques des tarifs douaniers sont relativement simples, car ils impliquent une hausse des prix et une baisse de la demande, mais il n’est jamais facile de calculer l’incidence nette sur une à deux années. Nous pensons que les investisseurs peuvent analyser le problème sous deux angles importants : i) ce qu’il signifie pour l’économie canadienne et ii) ce qu’il signifie pour leurs portefeuilles de placements mondiaux, qui sont en grande partie tributaires des répercussions sur l’économie américaine.

Canada : davantage malmené, mais aucune répercussion sur l’économie

Se préparer à l’impact

Les pourparlers et les craintes d’une récession au Canada sont valides, car les probabilités d’un fort ralentissement économique augmentent, mais l’incidence négative des tarifs douaniers sera probablement plus longue qu’un effondrement soudain de l’économie. La Banque du Canada a récemment révisé son estimation de l’incidence des tarifs douaniers sur l’économie canadienne (lire : Évaluation des conséquences potentielles des droits de douane américains – Banque du Canada) et prévoit un effet prolongé qui s’étend sur quelques années, avec un résultat composé final correspondant à environ 4 % du PIB. Ces scénarios sont certes des points de référence utiles à prendre en considération, mais le résultat dépend essentiellement de la réponse en matière de politique.

L’incidence directe des tarifs douaniers serait de frapper l’activité manufacturière, mais ce secteur représente maintenant moins de 10 % de l’activité économique globale du Canada, en baisse par rapport à environ 22 % en 20001. Le secteur manufacturier joue un rôle plus important en Ontario, où le segment de l’automobile est concentré. L’incidence indirecte est plus difficile à quantifier, mais nous pouvons nous attendre à certains effets d’entraînement, notamment en ce qui a trait aux investissements des entreprises, car celles-ci réévaluent leurs chaînes d’approvisionnement et leurs plans de production et pourraient réduire ou geler leur effectif.

La cavalerie à la rescousse

En ce qui concerne les facteurs d’atténuation, le premier à mentionner est la devise. Le dollar canadien s’est déprécié de près de 10 % depuis le début de 2024. Les sociétés exportatrices seront ainsi mieux positionnées pour composer partiellement avec les tarifs douaniers. Comme les marchés ne sont toujours pas certains de savoir si les tarifs douaniers seront maintenus à ce niveau dans un avenir prévisible, nous pensons que le huard pourrait perdre plus de terrain au profit du dollar américain si les tarifs étaient fixes et commençaient donc à nuire à l’économie.

Le deuxième facteur d’atténuation est la baisse des taux par la Banque du Canada (BdC). Comme son taux directeur se situe à 3 %, nous pensons que la BdC pourrait rapidement le réduire de 100 à 200 pdb pour compenser de façon anticipée l’effet des difficultés liées aux tarifs. Bien que les marchés aient commencé à réviser leurs prévisions en vue d’une politique plus énergique de la BdC en 2025, nous pensons que des réductions de taux plus importantes et plus rapides pourraient être annoncées si les tarifs douaniers étaient maintenus à 25 % (et à 10 % pour l’énergie) d’ici l’été (voir le graphique 1). Cette situation pourrait aussi peser sur le huard si la Réserve fédérale américaine (Fed) devait s’en tenir aux attentes du marché d’une à deux réductions de 25 pdb pour cette année, car l’écart relatif de la politique monétaire demeure le facteur déterminant pour le huard (voir le graphique 2).

Troisièmement, nous pensons que la politique budgétaire permettra de répondre aux besoins des entreprises qui ont besoin de financement d’urgence pour les aider à s’adapter aux turbulences commerciales. À notre avis, on ne peut exclure des mesures politiques fédérale et provinciale combinées équivalant à 1 % à 2 % du PIB.

Enfin, nous nous attendons également à ce que les tarifs douaniers nuisent partiellement aux bénéfices des entreprises, surtout au cours de la phase initiale, où les perspectives en matière de politique et de demande sont difficiles à évaluer. Nous pensons que les entreprises prendront le temps de réévaluer leurs perspectives en tenant compte de la fluidité du programme politique de Trump. Nous anticipons un ralentissement des investissements des entreprises au Canada, même en cas d’accord commercial; nous pensons que les politiques des États-Unis au cours des quatre prochaines années sous l’administration Trump resteront un sujet de préoccupation pour les entreprises.

Cette situation signifie que les politiques économiques canadiennes subiront de plus en plus de pressions pour effectuer un virage à 180 degrés et adopter des politiques bénéfiques aux entreprises et aux investissements afin de favoriser un environnement d’affaires plus concurrentiel pour le Canada.

Dans l’ensemble, le Canada devrait composer avec des perspectives de croissance difficiles et des risques croissants de récession au cours des 12 à 18 prochains mois si les tarifs douaniers sont maintenus à un niveau punitif de 25 %. Parallèlement, les tarifs douaniers pourraient faire en sorte que l’inflation persiste et réduise davantage un pouvoir d’achat déjà faible. En ce qui concerne les actions canadiennes, le choc direct des tarifs douaniers est limité dans les composantes de l’indice TSX. Nous pensons donc que la majorité de la négativité à l’égard des actions canadiennes découle en grande partie de la crainte d’une nouvelle dépréciation du huard et des effets d’entraînement généralisés qui pourraient couler l’économie, la plongeant en récession.

Graphique 1 : Attentes implicites du marché à l’égard du taux directeur du financement à un jour de la Banque du Canada

Graphique linéaire illustrant les attentes implicites du marché à l’égard du taux directeur du financement à un jour de la Banque du Canada

Source : Bloomberg, BMO GMA, au 3 février, 10 h 30

Graphique 2 : Nouvelles réductions de taux « d’urgence » par la BdC en réponse aux tarifs douaniers = dépréciation du huard

Graphique linéaire illustrant nouvelles réductions de taux « d’urgence » par la BdC en réponse aux tarifs douaniers = dépréciation du huard

Source : Bloomberg, BMO GMA, au 3 février, 10 h 30

États-Unis : l’économie peut-elle continuer d’afficher une tenue exceptionnelle?

Ces dernières années, les marchés ont souvent été marqués par l’exceptionnalisme des États-Unis, qui ont défié les attentes de récession et refusé toute forme d’atterrissage dans un contexte où le produit intérieur brut (PIB) réel continue de croître à un rythme soutenu et inégalé de près de 3 % sur 12 mois. De même, les attentes concernant la croissance aux États-Unis sont à la hausse depuis plus de deux ans maintenant (voir le graphique 3). Les tarifs douaniers pourraient réduire un peu les perspectives de croissance des États-Unis, mais à notre avis, ils auront un effet minime et retrancheront probablement tout au plus un demi-point de pourcentage. Comme la croissance devrait s’établir à 2,2 % en 2025, nous ne pensons pas que les investisseurs aient à se soucier des perspectives de croissance des États-Unis en raison des tarifs douaniers. Même si l’inflation devrait faire augmenter les tarifs douaniers, nous nous attendons à ce que la Fed soit plus prudente et procède à de nouvelles réductions de taux si la trajectoire de l’économie et du marché de l’emploi demeure solide.

Graphique 3 : Total cumulatif des révisions apportées aux prévisions consensuelles de croissance du PIB réel des États-Unis pour 2023, 2024 et 2025

Graphique linéaire illustrant total cumulatif des révisions apportées aux prévisions consensuelles de croissance du PIB réel des États-Unis pour 2023, 2024 et 2025

Source : Bloomberg, BMO GMA, au 25 janvier 2025.

Répercussions sur le portefeuille et perspectives : l’incertitude accrue offre des occasions prudentes

Depuis le mois précédent, nos portefeuilles de FNB vedettes affichaient déjà une sous-pondération ou une pondération neutre du Canada; et vendredi, nous avons acheté des options de vente à la Bourse de Toronto, ce qui nous a procuré une protection bienvenue contre les baisses. Pour ce qui est des obligations canadiennes, nous affichions déjà une duration2 légèrement longue, et ce positionnement pourrait continuer de profiter de nouvelles baisses de taux si la BdC accélère son assouplissement. Notre surpondération globale des actions reste inchangée et nous privilégions les États-Unis, même si les délibérations de notre récent point de vue montrent que notre cote précédente s’est estompée par rapport au mois dernier, surtout en raison des attentes de volatilité3 accrue des marchés et des valorisations exagérées des mégacapitalisations technologiques. La préférence de notre portefeuille pour les banques américaines a eu l’effet le plus avantageux, car des courbes des taux4 plus accentuées profitent habituellement aux services financiers. Le secteur de la santé a également connu un certain redressement au cours des dernières semaines, tandis que les secteurs défensifs des services publics et des biens de consommation de base ont été à la traîne. L’or a également procuré une protection, malgré la vigueur du dollar américain. En ce qui concerne le huard, nous avons commencé à mettre en place de très petites couvertures du dollar américain par rapport au dollar canadien lorsque ce dernier est passé sous la barre des 70 cents, et nous prévoyons d’augmenter cette couverture si le huard devait se déprécier.

Perspectives

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Sources

1Source : Statistique Canada, octobre 2024.

2Duration : Mesure de la sensibilité du cours d’un placement à revenu fixe en réaction à un changement qui survient dans les taux d’intérêt. La duration est exprimée en nombre d’années. On s’attend à ce que le cours d’une obligation dont la duration est plus longue augmente (baisse) plus que celui d’une obligation dont la duration est plus courte lorsque les taux d’intérêt baissent (augmentent).

3Volatilité : Mesure la fluctuation du cours d’un titre, d’un instrument dérivé ou d’un indice. La mesure la plus couramment utilisée de la volatilité des fonds d’investissement est l’écart type.Écart type : Une mesure du risque en fonction de la volatilité des rendements. Il représente le niveau historique de volatilité des rendements sur des périodes déterminées. Un écart type plus faible signifie que les rendements ont été historiquement moins volatils et vice versa. La volatilité historique n’est peut-être pas représentative de la volatilité future.

4Courbe des taux : Une ligne qui représente les taux d’intérêt des obligations dont la qualité de crédit est égale, mais dont l’échéance diffère. Une courbe des taux normale ou accentuée indique que les taux d’intérêt à long terme sont plus élevés que les taux d’intérêt à court terme. L’aplatissement de la courbe des taux indique que les taux à court terme correspondent aux taux à long terme, tandis qu’une inversion de la courbe des taux indique que les taux à court terme sont plus élevés que les taux à long terme.

Avis juridiques :

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